Gauche alternative en Corse
Lors d'une interview en direct sur Sudouest.fr, Emmanuel Macron a fait une déclaration qui a vexé Manuel Valls lorsqu’il l’a lue. Le ministre de l’économie répondait à une question sur le mélange des genres qu’on lui reprocherait : "J'entends les gens qui me le reprochent. Mais qui sont-ils ? Des gens qui ont été chefs de partis et ministres eux-mêmes. Des gens qui ont été maire de grandes villes de province et ministres régaliens quand ils n'ont pas été maire et Premier ministre. Soyons sérieux. Que me reproche-t-on ? Le mélange des genres que ces gens ont systématisé. Je ne fais pas partie de cette caste politique et je m'en félicite. Nos concitoyens sont las de cette caste". Cela a donné lieu à un recadrage en pleine séance parlementaire et des caméras n’en ont pas perdu une miette.
Manuel Valls s’est senti visé et Emmanuel Macron, tout penaud, a dit hypocritement qu’il visait Alain Juppé. Ce en quoi, Valls lui a rétorqué qu’il aurait dû le dire clairement, avant de détourné la tête avec mépris. Bon ! On peut dire aussi que, lorsque l’on se sent morveux, on se mouche : finalement, on en déduit que Manuel Valls fait partie de cette caste sur laquelle Macron crache pour justifier qu’il n’a jamais été élu. Il met en avant sa virginité électorale et élève ainsi au rang de vertu son arrivisme qui l’a fait surgir des arcanes du pouvoir en place. La cooptation et le parrainage semble, pour lui, plus vertueux qu’une élection. Il doit considérer l’énarchie comme une noblesse administrative (et non une caste) à laquelle il appartient et qui le dispense des urnes corruptrices. Le secrétaire général du PS s’interroge : Emmanuel Macron s'imagine-t-il en Sully (du nom d'un conseiller d'Henri IV, ndlr) ou bien finira-t-il en Brutus contre son père François Hollande envers qui il se réserve le dernier coup de couteau ? Il ne veut pas croire à une telle trahison mais, si Macron n’est pas Brutus, serait-il simplement le descendant du préfet du prétoire romain Macron ? L’histoire romaine nous révèle qu’un certain Quintus Naevius Cordus Sutorius Macro, dit « Macron », est né vers 21 av. J.-C. et mort en 38. Selon Tacite et Dion Cassius, il serait l'assassin possible de l'empereur Tibère. L’histoire peut-elle se répéter vingt et un siècle plus tard ? Macron est Macron et d’aucuns s’interroge sur sa nature humaine. Même son épouse pense qu’il est un chevalier venu d’une autre planète.
Renault Tarlet fait, sur Facebook, un portrait satirique du « chevalier venu d’une autre planète » (tel que le décrit son épouse sur Paris-Match). L’Internaute a décelé chez le ministre de l’économie un prototype fabriqué dans les laboratoires du Medef. Voici ce qu’il nous dit de la fiche de présentation de Lobotomax 2000 : « Les laboratoires du MEDEF ont la joie et la fierté de vous présenter leur dernière création : le robot Lobotomax 2000. Lobotomax 2000 est muni d'un algorithme qui lui permet de créer en quelques millièmes de secondes des kilomètres de logorrhée néolibérale, avec une capacité de vacuité et de crétinisme auto-satisfait jamais atteinte par aucun humain ni aucune machine jusqu'alors. Posé au milieu d'une foire à la saucisse ou de la rédaction du magazine Challenges, Lobotomax 2000 peut produire en quelques fractions de secondes des phrases de haute volée telles que " Aller de l'avant vers un projet multiple, c'est l'état d'esprit positif nécessaire à un agir pluriel". Les performances de Lobotomax 2000 sont stupéfiantes. Il peut produire en un souffle autant de néant que toute la rédaction du Nouvel Obs en toute une semaine. Il est, de plus, pourvu d'un module qui lui offre un sens de l'humour à peu près équivalent à celui d'une tronçonneuse à essence, indispensable pour lui permettre de déclarer qu'il ne "fait pas partie de cette caste politique" sans éclater de rire. Votez Lobotomax 2000, car quand notre pays est au bord du précipice, il est tant d'aller de l'avant (proverbe lemming) ».
Il s’agit donc d’un prototype de robocoopératif made in Medef. Ce candidat « macrombiotique », programmé « ni droite, ni gauche », est en marche vers les élections présidentielles. Il est conçu avec un système qui traduit en langage moderne l’Ancien régime. Son logiciel a parfois des ratées qui lui valent quelques déboires. Il s’est fait tancer par le colérique Valls et son visage a trahi le bug qui l’a laissé dans une grande solitude sur son banc de ministre. S’il se prend encore quelques camouflées, ses petits camarades vont finir par le mettre en quarantaine pour ne pas déplaire à leur chef. Le problème avec ce type de Lobotomax, c’est que la marche à arrière n’est pas prévue. Le logiciel ne sera changé qu’après les élections de 2017. La future version « Lobotomax 2017 » pourrait être plus perfectionnée mais pire que la première. Les laboratoires du Medef travaillent déjà sur de nouveaux algorithmes « ni de droite ni d’extrême droite mais surtout pas de gauche ». Le concept plairait déjà à l’intéressé qui n’a pas réussi à afficher une image de Gauche. La Gauche a senti son fumet et ne veut pas de son rôt. Il devra s’assumer à Droite. C’est le constat de son test d’auto-évaluation.
Ce sont ses capacités de vacuité et de crétinisme qui le rendent plus performant à Droite qu’à Gauche. C’est de ce côté-là qu’il souhaite améliorer ses capacités en laissant tomber toute interface virale avec la gauche. L’électorat de gauche a des antivirus sociaux qui mettent en danger la carrière de Lobotomax, d’autant plus que ses concepteurs ne lui ont donné que des données théoriques sur les gens du peuple. Cela lui a valu quelques dérapages sur le « monde ouvrier féminin » intégré dans sa mémoire comme analphabète et sans permis de conduire. On se souvient encore de ses déclarations sur l’avenir des femmes licenciées de la société Gad : « Il y a dans cette société [Gad], une majorité de femmes, il y en a qui sont pour beaucoup illettrées, pour beaucoup on leur explique: 'Vous n'avez plus d'avenir à Gad ou aux alentours. Allez travailler à 50 ou 60 km!' Ces gens-là n'ont pas le permis de conduire, on va leur dire quoi? »
Le mieux pour Macron est qu’il opère, après 2017, en terrain favorable comme, par exemple, au sein de la Juppépinière dans laquelle il pourra se développer harmonieusement. Le Sarkoland est aussi une option pour lui. Dans sa mémoire en reconstruction, il est question d’effacer certains de ces discours pour éviter des rechutes. Son credo restera cependant de coller à l’évolution du monde. Ses affinités avec le royalisme seront placées dans une case « nostalgie » avec un code d’accès. Il faudra un nom à particule pour l’entendre redire ce qu’il avait expliqué dans le journal le Point du 8 juillet 2015. Selon ce néo-royaliste, le peuple français n'a pas vraiment voulu décapiter Louis XVI. Toujours selon lui, il nous faudrait un roi. La démocratie comporte toujours une forme d'incomplétude, car elle ne se suffit pas à elle-même. Il y a dans le processus démocratique et dans son fonctionnement un absent. Dans la politique française, cet absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple français n'a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel, imaginaire, collectif : le roi n'est plus là ! On a essayé ensuite de réinvestir ce vide, d'y placer d'autres figures : ce sont les moments napoléonien et gaulliste, notamment Le reste du temps, la démocratie française ne remplit pas l'espace. On le voit bien avec l'interrogation permanente sur la figure présidentielle, qui vaut depuis le départ du général de Gaulle. Après lui, la normalisation de la figure présidentielle a réinstallé un siège vide au cœur de la vie politique. Pourtant, ce qu'on attend du président de la République, c'est qu'il occupe cette fonction. Tout s'est construit sur ce malentendu.
Notre Lobotomax a des incompatibilités avec la gauche et avec la République. On l’a dopé avec des algorithmes d’autosatisfaction qui n’excluent pas un dysfonctionnement narcissique pouvant lui laisser espérer rétablir la royauté et se sacrer Emmanuel Ier de France. Le seul espoir de le voir disparaître de la scène politique est qu’il vieillit très vite et que la rouille peut endommager ses circuits déjà rendus défectueux par ses passages à l’ENA et à la banque Rothschild. Changer son logiciel ne fera qu’accentuer son vieillissement prématuré. On ne pourra même plus en faire un Préfet comme l’était son homonyme romain. Ce serait dommages toutefois de l’envoyer à la casse. Il pourrait être exposé comme curiosité politique. Il a montré un intérêt historique et touristique.
Au Musée de l’homme, il n’aura pas sa place. Cependant, on pourrait rapidement l’envoyer au château de Versailles pour montrer aux visiteurs le prototype expérimental « Lobotomax », royaliste ni de droite ni de gauche, un spécimen unique pour ses malfaçons et son erreur de conception politique. On mettra sur sa fiche de présentation qu’il fut un jeune vieux ayant suscité un certain enthousiasme chez des groupies du Troisième âge. Ainsi, sans remonter jusqu’à l’empire romain, il sera dans son siècle de prédilection, celui des courtisans et des courtisanes. Il pourra « faire de la poussière ». « Fà u pulvericciu » est une expression corse qui sous-entend « faire plus de poussière que d’actions véritables ». Il n’en sera que moins nuisible.
Paul Capibianchi