Cela n’a pas empêché le secrétaire d’Etat aux transports Frédéric Cuvillier de renier ses paroles et ses engagements. Dans une déclaration faite au journal la Provence, en date du 4 juillet 2014, notre homme s’est prononcé pour le redressement judiciaire de la Sncm, à l’instar du patron de Transdev, principal actionnaire de la compagnie maritime ! Cela signifie-il la fin de cette dernière ?
Notre secrétaire d’Etat, qui par ailleurs vient de se distinguer en refusant de s’appliquer la loi sur le non cumul des mandats, s’assoie allègrement et sans vergogne sur les engagements officiels de l’Etat, entre autres, sur la mise en œuvre du plan industriel de redressement de la Sncm, pourtant signé avec l’ensemble des partenaires sociaux, y compris les marins Cgt. Au prix – il faut le souligner – de lourds sacrifices consentis, par exemple la suppression de 500 emplois. L’objectif était de sauver l’entreprise, mais aussi de préserver les activités sociales et économiques dépendantes de la compagnie maritime, dans la région marseillaise et en Corse. Transdev a remis en cause l’accord et s’est prononcée pour la liquidation de la Sncm. Les syndicats dans leur ensemble ont appelé à une grève reconductible à compter du 24 juin, à l’exception du Stc qui a préféré faire cavalier seul et se réfugier dans une conception identitaire de l’économie. Bonjour la solidarité entre travailleurs ! Cette grève occasionne beaucoup de perturbations et suscite de nombreuses réactions. Mais y avait-il pour les salariés de la compagnie une autre alternative ? Certains socio-professionnels de l’île ont organisé dans plusieurs villes de Corse des manifestations de protestation. C’est leur droit. Mais dans cette affaire, il ne faut pas se tromper de cible. D’aucuns ont cru devoir s’en prendre aux marins, de préférence syndiqués à la Cgt, responsables à leurs yeux de tous les maux. Ils se sont même livrés à des actes inqualifiables, comme sur le port de Porto-Vecchio. Des lascars, pas tous considérés comme étant des socio-professionnels, ont attaqué le Jean Nicoli, à coups de pierres et autres objets, inscrits sur les flancs du navire tout une série de graffiti et de mots obscènes. Les plus téméraires ont entrepris de brûler les amarres, obligeant le commandant à lever l’ancre afin d’éviter une catastrophe dans le port.
Ce qu’il y a de plus répugnant dans ces actions, c’est le fait que ces lascars se sont aussi attaqués à un symbole. Ils ont peut-être oublié qui était Jean Nicoli, résistant communiste, assassiné par les fascistes italiens. Vergogna.
Tous ces actes s’inscrivent dans une longue campagne de dénigrement lancée et activée par une presse bien-pensante contre la Sncm, ses salariés et ses syndicats. Campagne qui a contribué à créer un climat de haine. Curieusement ces mêmes media sont restés d’une grande discrétion sur le comportement de Corsicaferries, sa structure très opaque, sur ses pratiques, sur l’utilisation de personnel sous-payés, extracommunautaires, etc.
Les socio-professionnels corses seraient mieux inspirés à s’en prendre aux vrais responsables : Transdev et le gouvernement de Manuel Valls, et, à prendre fait et cause pour les salariés de la compagnie maritime en très grand danger. En outre, n’oublions pas que la Sncm injecte plus de 25 millions d’euros par an dans l’économie insulaire et y génère plusieurs centaines d’emplois.
Le gouvernement dit socialiste et dit de gauche, une fois de plus, se discrédite et continue de s’agenouiller devant le Medef et les marchés financiers. Il multiple les reculades et les trahisons. La dernière en date, le renoncement au critère de pénibilité pour les futurs retraités. Croît-il apaiser les ardeurs du Medef et de la Troïka ? L’un et l’autre exigent toujours plus de sacrifices. Il se goure superbement. Il est en train de donner le coup de grâce à la Sncm, avec à la clef : des milliers d’emplois supprimés et le champ libre à la Corsicaferries qui saura très rapidement user et abuser de sa future situation de monopole.
Les salariés de la Sncm sont à la croisée du chemin. La lutte continue. Ils ont tout notre soutien.
Le coq n’a pas chanté ce matin. Le pouvoir dit socialiste va vers des lendemains qui déchantent.
Jean-Antoine Mariani