Gauche alternative en Corse
Berlusconi revient
Un nouveau gouvernement s’est mis enfin en place en Italie, après deux mois d’épiques tractations et autres magouilles. Il est dirigé par Enrico Letta, numéro deux du Parti démocrate et est composé de vingt-un ministres dont sept femmes. Une nouveauté pour le pays. C’est un gouvernement d’union nationale. Il a reçu la bénédiction du nouveau, ex- président de la République, Giorgio Napolitano, de Silvio Berlusconi et du Vatican. Il devrait bénéficier de la confiance du Parlement italien en début de semaine prochaine, sauf sursaut salutaire des élus du Parti démocrate. D’ores et déjà, le Mouvement Cinq Etoiles de Beppe Grillo et la Sinistra Ecologia e Libertà de Nichi Vendola ont décidé de voter non.
Quel est ce fameux gouvernement d’union nationale ? Entre parenthèse, il suscite déjà, de ci de là, et en France en particulier un certain intérêt. Comme par hasard, un sondage montrerait que 75% des Français seraient favorables à une telle configuration politique pour le pays ! Comme c’est bizarre. Ce gouvernement d’union nationale rassemble donc le Parti démocrate, dit de centre gauche – Gramsci, Togliatti et Berlinguer doivent se retourner dans leurs tombes – le parti de Mario Monti et le parti du roi du bunga bunga. Tout un programme.
Le Président du Conseil est donc Enrico Letta. Ce dernier vient de la démocratie chrétienne et représente « l’aile catholique » au sein du Parti démocrate. Son oncle Gianni Letta est un des fidèles de Berlusconi. La vice-présidence est dévolue à Angelo Alfano du Parti du Peuple de la Liberté, lequel Alfano est également ministre de l’Intérieur. Aux affaires étrangères on retrouve l’inusable Emma Bonino, du Parti radical, ex commissaire européen et libérale dans l’âme, ex ministre de Berlusconi. L’économie est attribuée à Fabrizio Saccomanni, de la banque d’Italie, économiste formé à la célèbre université Bocconi de Milan, comme Mario Monti. Ce Saccomanni a déjà donné le la de ce que sera la politique menée par le nouveau gouvernement. Moins de taxes, moins de dépenses publiques, plus de sacrifices pour les couches sociales les plus modestes, plus de privatisations. Rien de bien original sous le ciel du Bel paese. On change d’individus, mais on continue la même politique, celle qui a mené l’Italie au bord du fallimento. Rien n’est dit sur l’évasion et la fraude fiscales, au demeurant gigantesques. Rien n’est dit sur les politiques menées en Europe sous la férule d’Angela Merkel et de la Troïka, si ce n’est pour les approuver. Tout cela n’a rien de réjouissant et promet probablement des lendemains qui déchantent encore plus.
Le Parti démocrate prend un risque considérable en cautionnant un tel gouvernement d’union nationale. Celui entre autres de mener le pays au désastre social et économique et de grossir les rangs de la désespérance. Cette désespérance qui poussent les Italiens à se réfugier dans l’abstention ou dans les bras de Beppe Grillo, personnage ambigu, populiste, pas toujours dans le bon sens du terme.
Quant à la vraie gauche, elle est quasiment absente du paysage politique italien. Elle ressemble à un champ de ruines, éclatée en mille chapelles, au grand dam d’une partie importante de la population. Une seule exception toutefois, l’existence de Sinistra Ecologia e Libertà, représentée au Parlement, avec 46 députés et sénateurs. Elle constitue le socle à partir duquel la gauche peut se reconstituer.
Pour conclure provisoirement, le seul vainqueur de cette affaire d’union nationale, véritable opération d’enfumage, c’est Berlusconi. L’homme est aux anges. Il rit de ce bon coup qu’il vient de réaliser. Quel est le but recherché par ce sinistre personnage, au-delà d’assurer la pérennité du système ultralibéral qui ravage l’Italie ? Celui d’être aux commandes des affaires du pays indirectement et surtout de tenter de sauver sa peau. De nombreux procès l’attendent.
Giampiero Lazio