Gauche alternative en Corse
Nous sommes au vingt et unième siècle et une charte de la laïcité apparaît encore nécessaire dans nos écoles pour notre actuel ministre de l’éducation nationale. Pourtant c’est un principe républicain qui ne date pas d’aujourd’hui et qui, en premier lieu, marque la séparation de l'État et de la religion et donc l'impartialité ou la neutralité de l'État à l'égard des confessions religieuses. Sans doute la prédominance du catholicisme et son influence persistante ont-ils favorisé une remise en cause de la laïcité dans nos établissements scolaires ouvrant le champ à la revendication d’autres religions. Aujourd’hui, les signes religieux ostentatoires se multiplient. Parler de laïcité apparaît comme une atteinte à la liberté des cultes et les mesures prises pour revenir à son principe sont dénoncées comme une stigmatisation. Il est temps de sortir de l’hypocrisie des bigots en tous genres qui veulent faire de ce siècle celui des religions. Il ne s’agit pas d’imposer l’athéisme mais de donner à chacun la liberté de choisir en échappant à l’endoctrinement et à la pression familiale ou communautaire. Contrairement à ce que veulent faire croire les religieux, la liberté est du côté de la laïcité.
La charte voulue par Vincent Peillon rappelle quelques règles parmi lesquelles: "les personnels ont un strict devoir de neutralité", le port de signes religieux ostentatoires est interdit, nul ne peut invoquer ses croyances pour refuser de se plier au règlement intérieur. Elle en ajoute une: "aucun élève ne peut invoquer une conviction religieuse ou politique pour contester à un enseignant le droit de traiter une question au programme".
Il ne s’agit pas simplement de rappeler par une charte un principe ancien mais de ne plus admettre qu’il soit bafoué. L’individu laïc n’est pas un non-croyant, un athée ou un infidèle, il est un homme commun qui n’impose pas à l’autre sa croyance religieuse ou sa conviction philosophique. Dès lors, il considère l’autre comme son semblable et non comme un hérétique. Il est donc le contraire du fanatique qui représente toujours un danger pour la cohésion et la paix sociales.
Comme l’écrit justement Henri Peña-Ruiz dans Histoire de la laïcité, genèse d'un idéal paru chez Gallimard , la laïcité « conjugue la liberté de conscience, qui permet aux options spirituelles de s'affirmer sans s'imposer, l'égalité de droits de tous les hommes sans distinction d'option spirituelle, et la définition d'une loi commune à tous visant le seul intérêt général, universellement partageable ».
Certes il ne faut pas tomber dans le discours du Front National sur une laïcité islamophobe à géométrie variable sur fond de revendication d’une culture judéo-chrétienne. La laïcité s’adresse à tout le monde mais, comme le fait remarquer Jean-Luc Mélenchon « n’est pas un gadget ». Selon lui, "la laïcité n'est pas une valeur qui se proclame, c'est un concept qui se décline concrètement par des prises de décisions courageuses". C’est évident. On se souvient du débat sur l’école privée et l’école publique. La Charte de la laïcité n’a été affichée que dans les écoles publiques et non pas dans les écoles privées qui bénéficient des 18,7% du budget de l'Education nationale alors qu’elles sont à 94% confessionnelles.
Cette charte ne fera pas oublier les conditions d’une rentrée scolaire mal préparée et n’est pas à mettre à la suite de quelques propos xénophobes tenus par un ministre de l’Intérieur placé à la l’extrême-droite du parti socialiste.
Malgré cela, nous restons persuadés que l’angélisme et la démagogie sont aussi néfastes que la xénophobie qu’elles alimentent. Lorsqu’il s’agit des principes fondamentaux de la république, l’Etat doit résister à toutes les pressions d’où qu’elles viennent et ne pas entrer dans le jeu de la stigmatisation dénoncée d’un côté par ceux qui ne veulent pas de la laïcité ni dans celui des xénophobes qui, de l’autre côté, stigmatisent les Musulmans et s’arrangent avec la laïcité lorsqu’il s’agit de l’intégrisme catholique. Ce n’est pas parce que la laïcité n’apas été totalement instaurée face au catholicisme qu’il faut permettre à d’autres d’en approfondir les failles.
La laïcité préserve la cohésion sociale. L’école est un lieu culturel et ne doit pas être un terrain cultuel. Il faut renvoyer la religion dans la sphère privée et les lieux de cultes. Les religieux n’ont pas droit au chapitre en matière d’éducation nationale car ils ont pour vocation de faire du prosélytisme confessionnel. Les conflits actuels montrent dans le monde arabe où mènent les fanatismes religieux et leur mainmise sur l’Etat. Au lieu de dénoncer une stigmatisation en favorisant le jeu du Front National, les Français musulmans devraient comprendre et accepter le sens politique et républicain de la laïcité qui concerne toutes les religions en respectant un autre principe fondateur de la république : l’égalité. C’est la laïcité et l’égalité qui sont des conditions pour la réalisation des deux autres grands principes que sont la liberté et la fraternité.
C’est mon avis et il n’engage que moi mais je le partage volontiers sans distinction de race ou de religion. Je suis pour la laïcité au sens républicain du mot, c’est-à-dire celui de la Commune de Paris qui vota en 1871 un décret de séparation de l'Église et de l'État et de la Troisième République qui a mis progressivement en place un enseignement non religieux et institué par l'État. Cela ne date pas d’aujourd’hui ni d’hier et il est même écrit dans l'Évangile selon Marc qu’il faut « Rendre à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ». Il faut rendre l’éducation nationale à l’Etat et la religion à Dieu.
Fucone