Gauche alternative en Corse
Au Parlement européen, ce jeudi à midi, réunis à Strasbourg en séance plénière, les eurodéputés ont adopté la directive sur la protection du secret des affaires. Un vote sans appel : 503 voix pour, 131 contre et 18 abstentions. En ce qui concerne les eurodéputés français, l’extrême-droite, la droite et le parti socialiste ont voté la directive. Au sein du PS, seuls trois frondeurs se sont abstenus démontrant que leur fronde ne lance aucune pierre lorsqu’il s’agit de voter. Ce sont les eurodéputés du Front de gauche et écologistes qui ont voté contre cette directive qui démontre une fois encore le poids du lobbying au niveau des instances européennes.
Le texte avait été proposé par la Commission dès novembre 2013. Il vise à protéger les entreprises contre l’espionnage industriel notamment, nous dit-on, les PME ainsi que des entreprises innovantes. Les entreprises pourront utiliser cette législation pour empêcher lanceurs d’alerte et médias de faire leur job. Elise Lucet, journaliste de Cash Investigations, s’en était émue et avait lancé une pétition pour que cette directive soit retirée.
Ce texte, élaboré par la Commission européenne en accord avec les industries – notamment pharmaceutiques et agrochimiques – constitue une violation inacceptable du droit des citoyens à l'information, et à la protection de leur santé et leur environnement : sous prétexte de protéger la propriété intellectuelle, il empêche à l'avenir tout contrôle indépendant, par les institutions, des particuliers ou des scientifiques, des produits commercialisés en Europe, et consommés ou utilisés chaque jour par la population.
C'est une attaque sans précédent de l'intérêt général. Au moment où le scandale Panama papers éclabousse les fraudeurs fiscaux, ce texte met en danger les lanceurs d’alerte et empêchera les journalistes de faire un véritable travail d’investigation. En outre il porte atteinte au droit des citoyens à l'information sur leur santé et l'environnement. Une nouvelle pétition a été lancée par Politis sur le danger sanitaire. Pour signer cliquer ICI.
La répartition des votes démontre la coalition entre le Parti socialiste, la droite et l’extrême-droite. Le Front National fait campagne sur la sortie de l’Europe et vote tous les textes ultralibéraux qui vont à l’encontre des intérêts nationaux. Le Front national dénonce un système dont il fait partie. Aux prochaines élections présidentielles, les médias et le gouvernement mettent en marche la programmation d’une confrontation entre les socialistes, les Républicains de droite et les frontistes d’extrême-droite pour rejouer la partition du « vote républicain ». Le Front national joue sur les peurs et le nationalisme en se servant d’un pseudo-euroscepticisme illustré par la participation de l’extrême-droite aux mesures antisociales et ultralibérales que les instances européennes proposent. Le dernier vote du FN en faveur de la directive « secret des affaires » serait-il dicté par l’affaire Panama papers dans laquelle des personnalités du FN apparaissent comme, en premier lieu, Jean-Marie Le Pen ? L’enquête conduite par Le Monde en partenariat avec le Consortium international de journalistes d’investigation (ICIJ) a permis de mettre au jour un système de dissimulation d’avoirs financiers, organisé dans des centres offshore d’Asie et des Caraïbes par le premier cercle de fidèles de la présidente du Front national (FN), au premier rang desquels l’homme d’affaires Frédéric Chatillon et l’expert-comptable Nicolas Crochet. Tous les deux sont aujourd’hui mis en examen dans le cadre de l’enquête sur le micro-parti de Marine Le Pen et le financement des campagnes présidentielle et législatives de 2012.
Secret des affaires et répression sociale !
D’autres personnalités de la classe politique dominante sont-elles impliquées dans le plus gros scandale de fraude fiscale et d’évasion de capitaux ? Comment faut-il interpréter la nomination du Président de la commission européenne, avec le vote de la France, en la personne controversée d’un Jean-Claude Juncker, ancien ministre des finances et premier ministre du Luxembourg, paradis fiscal des grandes entreprises ?
La France et l’Europe ont besoin d’un réveil démocratique. Les politiques menées ne font que renforcer l’euroscepticisme et l’ultranationalisme. L’Europe de la Finance et du lobbying pousse les électeurs à l’extrême-droite qui instrumentalise les problèmes sociaux tout en participant au système qui a installé une classe politique dominante en quête de stratégie électorale pour maintenir l’ordre libéral qui ne donne la liberté qu’aux riches, aux patrons et aux tourisme financier dans les paradis fiscaux. La contrepartie de cette liberté économique et du secret des affaires est toujours antisociale et privative de libertés individuelles, en premier lieu celle de l’information. La privation d’informer précède en général la répression et l’installation d’un ordre autoritaire. Le mouvement « Nuits debout » inquiète. La répression policière a précédé l’entrée en lice de casseurs. Il sera sans doute bientôt interdit si les coups qui lui sont portés et les vacances n’en viennent pas à bout. Lorsqu’il a parlé de l’opposition de gauche lors du lamentable « dialogue citoyen » organisé par David Pujadas et Michel Field, François Hollande a utilisé le terme « la rue ». En un mot qui sous-entend le désordre, il a montré son mépris pour cette contestation qu’il considère comme adolescente, donc immature. Il avait fait de la jeunesse sa priorité. Il lui envoie les CRS et les gardes mobiles.
D’un côté la répression sociale s’installe. En marge, la déréglementation s’accélère et l’omerta est offerte au monde de la Finance. La liste des eurodéputés qui ont voté la directive « secret des affaires » a été publiée. Il faudra faire de même avec le vote de la loi El Khomri. Chaque parti politique et chaque élu seront responsables de leurs votes devant leurs électeurs lors des futures élections. Il faudra non pas les juger sur leurs belles paroles mais sur leurs actes.
U Barbutu