Gauche alternative en Corse
Lettre à Monsieur Mélenchon
« On a mal pris la comparaison avec Bolloré. C’est d’une méchanceté inouïe, c’est infâme. Mais quand on veut tuer son chien on l’accuse d’avoir la rage » tels sont les propos de M. Gérard Miller, l’un des fondateurs du site d’information « Le Média » proche de la France Insoumise en réponse à la réaction d’Aude Rossigneux, journaliste présentatrice, remerciée dès sa période d’essai achevée.
On a mal pris l’emploi des mots tambouille, usurpateur, duperie, (et j’en passe). C’est d’une méchanceté inouïe, c’est infâme. Mais quand on veut tuer son chien on l’accuse d’avoir la rage.
Les propos de M. Miller ont fait résonnance à l’insoumise engagée que je suis, ils résumaient exactement ma réaction incrédule, face aux propos de M. Mélenchon tenus à l’adresse des insoumis(e)s de Corse dans un premier tweet publié le 3 septembre 2017 à l’annonce des discussions engagées entre le PCF de Corse et la Corse insoumise pour des élections territoriales qui ne concernaient que la Corse.
Depuis, et je m’adresse là à M. Mélenchon, votre déchainement au travers de ce que vous croyez toujours de « bons mots », diffusés par le biais de tweets sporadiques, tombent, on ne sait plus trop pourquoi sur la Corse. À mon avis M. Mélenchon, aujourd’hui ils ne font qu’émailler et égratigner un peu plus le mouvement de la France insoumise.
Si je vous ai écouté longuement et longtemps, si je vous ai soutenu et aidé, avec mes ami(e)s insoumis(e)s, cela a été uniquement pour porter un programme ambitieux et seul capable d’apporter un changement dans une société gangrénée par un capitalisme arrogant et destructeur.
Un programme, l’Avenir en commun, fleuron d’une sixième République où il n’existe plus de monarque absolu, où la voix citoyenne est entendue. Une sixième République émancipatrice qui s’attache à redonner dignité et confiance à chaque personne l’incitant à s’impliquer dans la vie quotidienne en défendant les principes de solidarité, d’égalité et de défense de l’environnement.
Vous étiez celui qui alors semblait le mieux porter cette ambition, constant depuis 2012 à faire évoluer l’humain d’abord vers un avenir en commun. Nous étions encore sous la 5ème République et il nous fallait élire un Président.
Des femmes et des hommes, partout sur le territoire, des villes aux villages, des quartiers aux rues, se sont investis, sans compter, pour concrétiser cet engagement lors des élections législatives.
En Corse, aussi, où vous ne vous êtes pas déplacé, malgré nos demandes, les forces se sont mobilisées et réunies. Les groupes d’appui sont très vite sortis de l’isolement que l’organisation de la France Insoumise avait généré. L’engagement associatif et militant de bon nombre des insoumis(e)s appelait à un rassemblement naturel et les débats et réunions publiques se sont faits ainsi de façon très conviviale et très instructive.
Des discussions animées et beaucoup de points communs et de volonté à renverser un système qui ne sème que le malheur. Comment aujourd’hui se prétendre heureux quand tout va mal et que par-delà les guerres terribles, la misère, la famine au pied de chez vous de plus en plus de femmes et d’hommes vivent la rue où les enfants ne sont même plus épargnés.
Alors ce tweet du 3 septembre 2017 dont je rappelle ici la teneur : "Des insoumis ont engagé une liste avec le PCF en Corse sans prendre aucun avis. Je ne soutiens pas cette initiative et ... cette tambouille. » a été incompréhensible.
Déjà le « sans prendre aucun avis » me gêne et c’est là que le bât blesse. Je vous rappelle que déjà en 2016, nous avions rencontré votre directeur de campagne et que nous lui proposions un document de réflexion sur la situation de la Corse, à mettre en concordance avec le programme de l’Avenir en commun et les spécificités d’une île belle et rude à la fois où nous avions fait le choix de mettre en avant les problèmes sociaux. Nous n’occultions pas les nombreuses autres questions qui animent encore et toujours la société insulaire.
Régulièrement par la suite, dans un souci de transparence et de démocratie, nous avons fait suivre les comptes rendus hebdomadaires des réunions organisées par les insoumis(e)s à votre directeur de campagne, via mails, qui à l’approche des élections territoriales, faisaient état des réflexions, des discussions, des perspectives et des forces à mobiliser pour que la gauche de la gauche soit représentée au sein de la Collectivité Unique de Corse.
À ce stade je me dis que M. Bompard n’a peut-être pas fait son job et a oublié de vous informer de ce qui se passe sur l’île lointaine, laissée à sa portion congrue. Il est vrai que nous ne représentons que 0,53 % des électeurs potentiels inscrits sur les listes électorales.
Comment un homme que j’avais activement soutenu pour porter le programme l’Avenir en Commun, avec bien d’autres insoumis(e)s, aux plus hautes instances de l’État pouvait-il à ce point se rabaisser à de si basses manœuvres.
Encore aurions-nous pu à la limite les tolérer si suite à de multiples échanges et discussions, âpres peut-être, où chacun aurait pu avancer ses arguments, vous auriez été pris d’un coup de colère…Soit on vous connait impulsif.
Même s’il pouvait y avoir des discussions certainement légitimes et défendables à un rassemblement avec le PCF de Corse, comment imaginer que la gauche que nous défendions soit absente des décisions d’une des régions les plus pauvres de France. J’ai aussi rencontré et partagé avec des militant(e)s communistes qui n’étaient pas des diables et qui sincèrement avaient au cœur l’humain. Le PCF a aussi son histoire qui a compté, n’oublions pas le Conseil National de la Résistance.
Voyez-vous M. Mélenchon, même si nous manquons quelque peu d’organisation, nous respectons la politique. Elle n’est pas l’apanage d’un aéropage autoproclamé à vie. On tourne en boucle et c’est toujours les mêmes qui reviennent. Vous semblez aujourd’hui donné l’impression d’en être. Vous seriez devenu, vous aussi, l’homme incontournable et indispensable à la construction d’une alternative sociale et écologique, toutes les décisions et initiatives devant dorénavant être contrôlées. On en veut pour preuve les rappels à l’ordre de certains députés insoumis qui, on les excusera, ont cru qu’une certaine liberté de pensées et de paroles était encore possible au sein de leur mouvement.
Mais non, nul n’est indispensable, aujourd’hui M. Mélenchon, c’est pour ça que je ne vous accorderai plus ma confiance. Je l’ai fait deux fois de suite mais votre attitude lors des élections qui ont concerné la Corse, l’endroit où je vis, m’a démontré que vous n’êtes pas l’homme de la situation. Homme de lettre, beau parleur, théâtral certes mais il faut beaucoup plus aujourd’hui pour convaincre. La situation est trop grave.
Je ne finirai pas cette adresse, sans vous remercier quand même d’une chose, vous m’avez ouvert les yeux, sur les travers à ne pas commettre et les confiances à donner en gardant les yeux bien ouverts. Je n’ai pas l’ambition à ce que ces quelques mots vous parviennent, vous n’en auriez rien à faire, mais je partagerai mes sentiments avec les insoumis(e)s qui n’en peuvent plus de vivre sous le diktat.
Je rejoins maintenant mes ami(e)s insoumis(e)s de Corse et d’ailleurs, car bien sûr vous n’avez toujours pas le monopole de l’insoumission, qui continuent à engager des réflexions et tracer des perspectives pour qu’aboutissent des valeurs retrouvées qui feront que chaque femme et homme comptera pour un.
Pascale Larenaudie
Citoyenne insoumise et indignée