Gauche alternative en Corse
Créée en 1954, la Taxe sur la Valeur Ajoutée est connue. C’est un impôt indirect sur tous les biens de consommation et les services. Lorsque le consommateur achète un produit, il paye une taxe à l'Etat qui est incluse dans le prix d'achat. La production et toute la chaîne de distribution commerciale jouent les rôles de collecteurs d’impôts. Payée par tous les consommateurs, la TVA constitue la ressource la plus importante du budget de l'Etat. Plus de 45% des recettes de l'Etat proviennent du produit de la TVA alors que l'Impôt sur le Revenu ne représente que 20% sur l'ensemble des recettes, et l'impôt sur les sociétés seulement 15%.
Le candidat Nicolas Sarkoz en campagne répétait à la ronde son slogan favori : "travailler plus, pour gagner plus". Il veut revaloriser le travail, dit-il encore. Cette revalorisation passerait par l'augmentation des heures supplémentaires mais aussi par la volonté de moins taxer le travail pour encourager les embauches. Lui et son entourage affairiste ne cessent de répéter que compétitivité rime avec allègement des charges sociales sur les entreprises. La plupart des entreprises acquittent l'Impôt sur les Sociétés ou la CSG, Contribution Sociale Généralisée, pour financer en partie les dépenses sociales : indemnités chômage, soins, retraite.
Nicolas Sarkozy, plus près du Medef que des syndicats des travailleurs, a pour mission de diminuer ces charges afin que les entreprises soient plus compétitives et, donc, qu'elles soient moins réticentes à embaucher. Sa dernière trouvaille est la TVA sociale. Chirac l’avait évoquée en 2006. Nicolas Sarkozy s'est prononcé pendant la campagne présidentielle de 2007 pour "l'expérimentation" de cette TVA sociale, tout en proposant qu'elle soit accompagnée d'un suivi sur ses effets, notamment en matière d'inflation. Le 20 juin 2007, il confirmait vouloir mettre en place cette expérimentation, dans un secteur économique particulier. Fillon étudie toujours, depuis 2007, l'instauration d'une TVA sociale. Besson et Lagarde ont travaillé sur la question. Voilà l'idée qui vient de resurgir à mots couverts dans le dernier discours d'un Sarko, pourfendeur des fraudeurs sociaux.
Cette Taxe sur la valeur ajoutée n’est pas une mesure pour améliorer le sort des salariés et des classes populaires. Qu’on ne s’y trompe pas! Elle consiste à augmenter la TVA pour financer les dépenses sociales afin de diminuer les charges sociales des entreprises. C’est la part patronale de la différence entre le salaire net (reçu par le salarié) et le salaire brut. Le principe de la TVA sociale est donc d'augmenter le taux de TVA pour financer la protection sociale et, par un transfert de ressources, de diminuer les charges sociales payées par les entreprises. Il s'agit de compenser cette diminution par la hausse de la taxe sur les biens de consommation payés par tous. A terme, toute la protection sociale serait financée par les consommateurs, donc potentiellement tout le monde, à la place des entreprises. Selon les économistes, pour réaliser ce transfert de fonds, il faudrait augmenter la TVA de 5 points, un point de TVA rapportant en moyenne 7 milliards d'euros supplémentaires. Ainsi, le taux de TVA passerait de 19,6% à 24,6%.
En 1994, une loi Perben a initié, en France d’Outre-mer, une TVA sociale dans les départements de la Réunion, de la Guadeloupe et de la Martinique. Le taux de TVA y a été relevé de 7,5 % à 9,5 % avec des allègements de charges sociales pour les entreprises dans les secteurs de l'industrie, l'hôtellerie, la restauration, la presse, l'agriculture et la pêche.
D’une part, en 1999, une étude du ministère de l'Outre-mer a relevé que quatre fois plus d'emplois avaient été créés dans les secteurs exonérés que dans les secteurs non exonérés entre 1996 et 1998 mais a jugé difficile d'isoler l'impact des exonérations sectorielles des autres facteurs concourant à la création d'emplois. D’autre part, une étude économétrique de l'INSEE a montré en 2000 que, pour la Réunion, la loi Perben n'a expliqué que 20 % des embauches dans les entreprises exonérées. Cette loi a également institué un CAE (contrat d'aide à l'emploi) pour l'ensemble de l'économie. Difficile donc de quantifier la part de créations d'emplois due aux exonérations de cotisations patronales. En revanche, ce qu'on peut dire, c'est que la forte hausse du SMIC en 1995 (alignement du SMIC réunionnais sur le SMIC métropolitain) n'a pas provoqué de ralentissement de l'économie. Les mesures d'exonérations ont peut-être eu leur rôle, mais les exonérations de charges auraient plus profité aux micro-entreprises (2 à 4 salariés) en situation économique critique et très sensible au coût du travail.
Le coût du travail est un élément qui peut procurer (ou faire perdre) un avantage concurrentiel. La protection sociale (santé, retraite, assurance chômage, etc.), est traditionnellement financée par des cotisations sociales, payées par l’employeur et le salarié sur chaque salaire. Baisser les cotisations sociales permettrait de renforcer la compétitivité-prix, nous dit-on. En réalité, l’'instauration de la TVA sociale pose de sérieux problèmes. D’abord la TVA est l'impôt le plus injuste de tous les impôts puisqu'il est payé par tout le monde au même taux, quel que soit le revenu. Augmenter le taux de TVA revient à augmenter le prix des produits en entraînant une baisse significative de la consommation et donc de la croissance économique. Il s’en suivra une baisse de la production et une aggravation du chômage. En outre les recettes de l'Etat pour financer les indemnités chômage, les retraites, les dépenses de maladie, deviendraient entièrement dépendantes de la croissance. Si la croissance économique venait à faiblir, si la récession s’installait, les recettes en TVA sociale diminueraient et le déficit de l'Etat s'aggraverait encore plus rapidement que dans le système actuel. Wait and see!
La TVA sociale sur le Blog de Jean-Luc Mélenchon : cliquer ICI