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Gauche alternative en Corse

La réponse du Berger à la Bergère

europe_euroMalgré une charte d’éthique entre actionnaires et journalistes du Monde, selon laquelle « les actionnaires n’ont pas leur mot à dire sur les contenus éditoriaux », l’actionnaire du Monde Pierre Bergé, président du Conseil de surveillance,  a affirmé sur la radio RTL qu’il « réprouvait » les méthodes des journalistes du quotidien français lorsqu’il donne des noms de fraudeurs du fisc dans l’enquête sur le scandale de fraude fiscale de HSBC Suisse. Pour lui c’est de la délation et du populisme.  « Est-ce le rôle d’un journal de jeter en pâture le nom des gens ? (s’interroge-t-il avant de poursuivre)  C’est du populisme. C’est fait pour flatter les pires instincts. Ce n’est pas pour ça que je leur ai permis d’acquérir leur indépendance. Ce sont des méthodes que je réprouve … Je ne veux pas comparer ce qui se passe à des époques passées mais quand même, la délation, c’est la délation. C’est jeter en pâture des noms ». Si ce n’est pas une mise en garde, cela lui ressemble.  Et d’autres actionnaires du Monde sont aussi montés aux créneaux comme Matthieu Pigasse, coactionnaire du Monde et vice-président de la banque Lazard, qui appelle ses journalistes remarquables dans leur travail d’investigation ne pas tomber dans la délation. : « Il est vrai qu’il y a un juste équilibre à trouver entre le fait de divulguer des informations d’intérêt général, d’intérêt public » et le fait « de ne pas tomber dans une forme de maccarthisme fiscal et de délation », a-t-il dit. Nous n’avons pas trouvé de déclaration du troisième actionnaire Xavier Niel. De son côté, le directeur du Monde, Gilles Van Kote, a réaffirmé l’troissingeséditoriale de la rédaction.

Il ne faudrait pas oublier que les avoirs qui échappent au fisc représentent la moitié de la dette mondiale, soit environ 20 mille milliards d'euros. On les trouve dans des réseaux de banques qui opèrent avec des succursales offshores. Des banques françaises sont concernées.  Des réseaux financiers de fraude travaillent dans l’impunité et le secret. Qu’ont fait les gouvernements européens si ce n’est repousser toujours plus loin dans le temps les mesures à prendre, pour laisser le temps aux réseaux financiers de créer de nouvelles filières.

« Délation » et « populisme » ? Si c’est de la délation, les intéressés peuvent déposer plainte en s’estimant diffamés. Après le bouclier fiscal de Sarkozy, leur faut-il aussi un boulier judiciaire ? Il faudrait que leur dossier fiscal fasse l’objet d’une transaction secrète avec le fisc, un arrangement qui ne change rien sur e fond.  En quoi est-ce populiste de donner des noms connus dont certains s’ingénient à faire parler d’eux dans la presse people ? N’est-ce pas l’apparition de listes de noms qui est à l’origine de régularisations ? N’est-ce pas en donnant des noms que l’on pourra faire peur aux futurs fraudeurs ? Quel autre moyen a-t-on actuellement de pousser ces mauvais contribuables à payer ? Ce qui choque le plus chez ces gens, c’est le nombre de ceux qui détenaient des comptes en Suisse « à l’issue de leur plein gré » et notamment par des héritages. Comme dit la chanson on ne choisit pas sa famille, on choisit ses amis…  politiques.  Pourquoi ne pas donner les noms de ces parlementaires qui votent les lois fiscales et s’en sont affranchis ? Pourquoi ne pas citer ces stars du showbiz et du sport qui affichent leurs trains de vie somptuaire en fraudant le fisc ? Si les gouvernements susceptibles avaient fait véritablement le nécessaire, nous n’en serions pas là. Si les fraudeurs n’avaient pas la possibilité d’utiliser leurs amitiés politiques pour que leurs dossiers soient examinés avec bienveillance par les services du Ministère des Finances, la presse n’aurait pas à dévoiler des noms de fraudeurs pour donner des exemples. Là où les journalistes font leur travail, on s’aperçoit qu’ils le font contre l’avis des actionnaires de leurs journaux. Les journalistes doivent restés dans les rails libéraux et ne pas s’attaquer aux amis fraudeurs de leurs patrons. Entre riches, on ne se cherche pas des poux fiscaux dans les cheveux. D’ailleurs le terme « fraude » est banni et ils lui préfèrent l’expression « optimisation fiscale ».

En 2008, Eric de Montgolfier, procureur célèbre, avait récupèrè un listing informatique contenant des informations sur des milliers de comptes cachés par la banque HSBC. Ce listing c'est Hervé Falciani, embauché comme informaticien par la filiale suisse de la banque HSBC, à Genève, qui l'avait dérobé et avait tenté de monnayer avant de finir par le remettre aux autorités.  Dans ces listings on trouve le nom d'hommes d'affaires, de chefs d'entreprise, d’avocats, de médecins ou de personnes mises en cause dans des dossiers judiciaires comme dans l'affaire Elf ou l'Angolagate. Le dossier embarrassait sérieusement le pouvoir de l'époque, notamment la garde des Sceaux, Michèle Alliot-Marie. Eric de Montgolfier a expliqué au journaliste Benoît Collombat, qu’un beau jour l’ordre lui a été donné de "rapporter les fichiers aux Suisses".  Le Procureur n’a pas obéi et ces fichiers ont atterris chez des journalistes. L’affaire n’est pas révélée grâce à la Garde des Sceaux de l’époque. Il a fallu beaucoup de détermination au procureur Eric de Montgolfier pour dissuader Michèle Alliot-Marie de satisfaire les autorités helvètes. Ce sont finalement les médias et non la justice qui ont mis l’affaire HSBC au jour. Quand à Eric Woeth, lorsqu’il était ministre du budget, il a agité la liste devant les caméras pour pousser les fraudeurs à une régularisation par transaction avec le Fisc. Pour l’heure, sur des milliers de noms, seuls quelques uns ont été rendus publics. De nouveaux noms sortent au fil du temps.

Pierre Bergé ne déroge pas à la règle de la solidarité de classe entre grandes fortunes. A-t-il peur d’être un jour lui-même victime de délation et de populisme, lui qui vient d’être promu au grade de grand officier de la légion d’honneur ? On lui doit certainement déjà en partie  la ligne éditoriale politique du Monde qui est resté dans le girond socialiste alors que le Figaro est dans celui de la droite. Veut-il aussi une omerta fiscale ? À plus de 80ans ans, Pierre Bergé est le cofondateur de la maison Yves Saint Laurent. Il est l’archétype français de la « gauche caviar » et PDG de la brasserie de luxe parisienne « Prunier », spécialisée dans le caviar français. Il est aussi  propriétaire d’une maison de vente aux enchères à Paris, rue Drouot, une société de vente volontaire, la Maison Pierre Bergé et associés, qui dispose également d'une antenne à Bruxelles, sur la place du Grand Sablon. Actionnaire du Monde, il est aussi fondateur du mensuel homosexuel Têtu et président du Sidaction. Il, est classé, malgré cela, à la 349ème place des grandes fortunes française, avec 120 millions d’euros (classement Challenges 2013). Pourtant la seule vente d’une partie de ses collections d’objets d’art (non-inclus dans l’assiette de l’ISF) « aurait rapporté à ce mitterrandien de stricte observance la bagatelle de 373,5 millions (habilement reversés à la Fondation PB-YSL) » selon des articles non démentis à ce jour. Ce n’est pas avec un financier mitterrandien comme lui, riche donateur de la campagne du PS en 2007, que le parti socialiste va lutter efficacement contre la fraude fiscale. On peut le dire sans faire de la délation ou le livrer en pâture par populisme.

Toutefois, les noms publiés ne doivent pas servir de diversion pour faire oublier la responsabilité des gouvernants et, en ce qui nous concerne, de ceux de la communauté européenne qui ont placé à la tête de la commission européenne Jean-Claude Junker, ex-dirigeant d’un paradis fiscal au sein de l’Europe et responsable d’une affaire de dumping fiscal pratiqué par le fisc luxembourgeois. Le refus de la mise en place d’une commission parlementaire sur ses responsabilités dans un système de fraude fiscale institué au sein de la communauté européenne n’est pas un signe d’indépendance de l’union européenne vis-à-vis de la Finances, de ses filières bancaires et de ses paradis fiscaux. Le maintien à la présidence de la commission européenne de Monsieur Jean-Claude Junker est l’affirmation que rien ne va changer sur le fond. La commission européenne apparaît comme la bras technocrate de la Troïka et de la finance internationale.

Battone

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